jeudi 19 mai 2022

Les oiseaux

Parmi les activités scientifiques à DDU, l'étude du monde animal occupe une part importante au travers des programmes de biologie. C'est notamment le cas des oiseaux.

Huit espèces d'oiseaux sont présentes en terre Adélie et font l'objet d'études de très longue durée, avec des suivis qui ont débuté dans les années 1950/1960.

A tout seigneur, tout honneur commençons par le manchot empereur. Inutile de le présenter, c'est le plus connu et il a déjà fait l'objet de plusieurs articles. Présente de fin mars à janvier, la population actuelle d'environ 4000 couples à DDU, est désormais stable après une brutale chute de moitié dans les années 1970 (raisons climatiques). Un poussin par couple et par an, 40 kg à l'age adulte, 1,20 m de hauteur, une longévité d'une quarantaine d'années, il vit sur la glace (c'est sa particularité, d'où sa présence en hiver). Et bien qu'il ne vole pas mais nage, rampe et marche, c'est un oiseau. Au quotidien, c'est un peu "pépère placide", curieux et pas farouche du tout. Bref, la force tranquille.

Camille MERMILLON/Institut Polaire Français

Qui ne vole pas non plus mais nage et marche, le manchot Adélie. Pus petit que l'empereur. D'un poids adulte de 8 kg et d'une taille de 50 cm, il vit une trentaine d'années. 40.000 couples à Dumont d'Urville, présents de mi-octobre à fin février (donc en été), ils vivent sur les rochers, y compris au milieu des bâtiments de la base. C'est une population en légère expansion en terre Adélie. Deux poussins par couple et par an. C'est un oiseau bruyant, un petit hargneux, volontiers bagarreur et chapardeur de cailloux pour réaliser son nid. Un petit hargneux, agressif et qui bouge tout le temps ? Bizarre, ça me rappelle quelqu'un... pour peu qu'on lui trouve une Rolex...😏 !

Jimmy ALLAIN/Institut Polaire Français

Le plus grand oiseau d'Antarctique, c'est le Pétrel Géant d'Antarctique (prononcez PGA, vous ferez "pro"). Une petite dizaine de couples seulement à Dumont d'Urville, autant vous dire que l'espèce est plus que menacée et donc très protégée. Présents de juillet à mi-avril, ils nichent dans les rochers. Un poussin par an et par couple, une espérance de vie d'un demi-siècle au maximum, l'adulte pèse environ 5 kg et déploie une envergure jusqu'à 2 m. C'est un charognard terrestre et marin qui s'attaque également aux poussins de manchots. En hiver, après l'envol des poussins, les PGA désertent le secteur de DDU pour évoluer vers le sud des continents américain et africain ainsi que l'Australie et la Nouvelle Zélande.

Jimmy ALLAIN/Institut Polaire Français

Parfaitement camouflé dans le milieu polaire, vertébré le plus austral au monde puisque observé jusqu'à 350 km à l'intérieur du continent antarctique, le pétrel des neiges est présent à DDU de mi-octobre à fin avril de chaque année. 1000 couples environ, bien cachés au sein des rochers des iles de l'archipel de pointe géologie, ils s'y reproduisent à raison d'un poussin par couple et par an. Après un fort déclin au milieu des années 2000, la population est aujourd'hui stabilisée. D’une longévité qui peut également atteindre le demi-siècle, le pétrel des neiges, qui pèse au maximum un demi-kilo à l'age adulte, demeure dans l'océan antarctique chaque hiver austral. C'est la douceur même, on aurait presque envie de lui faire un câlin....si ce n'était pas interdit !

Jimmy ALLAIN/Institut Polaire Français

C'est le prédateur aérien de DDU, tout en haut de la chaine alimentaire : le skua antarctique ou Labbe de McCormick. Présent lui aussi de mi-octobre à fin avril, il s'attaque sans crainte aux œufs de manchots et aux poussins. Il n'hésite pas à charger l’humain pour défendre son territoire. Une soixantaine de couples à DDU se reproduisent à raison de un à deux œufs par an et par couple. D'une longévité d'une trentaine d'années, il quitte la terre Adélie en hiver pour rejoindre des contrées parfois très éloignées (Canada, Groenland, Russie, Japon par exemple). Si célèbre qu'il désigne dans le langage courant "adélien" n'importe quel hivernant un tant soit peu affamé ! Un "hivernant affamé" ? : Zut, un pléonasme 😂.

Jimmy ALLAIN/Institut Polaire Français

Le fulmar antarctique ou Fulmar argenté est présent à DDU de mi-octobre à fin février. Une cinquantaine de couples dans l'archipel de pointe géologie, l'adulte pèse environ 1 kg et vit au grand maximum une trentaine d'années. Avec un poussin par an et par couple, l'espèce est plutôt stable. A noter : une fidélité au partenaire et au nid jusqu'à une petite dizaine d’années constatée, ce qui est plutôt exceptionnel dans le milieu des oiseaux. Pour sa reproduction, il niche en falaise escarpée pour échapper aux prédateurs. Il y a d'ailleurs un lieu dit "la falaise aux fulmars" à DDU. Très bien pour sa sécurité, un peu moins pour celle de Jimmy l'ornithologue en charge du suivi de la population...

Jimmy ALLAIN/Institut Polaire Français

 Le damier du Cap ou pétrel du Cap pèse un peu moins de 500 g à l'age adulte et vit au maximum une vingtaine d'années. Présent pour sa reproduction en terre Adélie de mi-octobre à fin avril, il prend la direction du nord, vers l'équateur le reste de l'année. Avec un poussin par an et par couple, sa population actuelle à Dumont d'Urville est plutôt stable, aux environs de 500 couples. Ce n'est pas une espèce menacée avec deux millions d'individus évalués dans le monde. Il tire bien évidemment son nom de son plumage supérieur.

Jimmy ALLAIN/Institut Polaire Français

Enfin, L'océanite de Wilson, autrefois appelé pétrel de Wilson, est numériquement l'oiseau marin le plus représenté dans le monde (entre six et dix millions de couples). Avec 2000 d’entre eux environ présents à DDU de mi-octobre à fin avril, la population est stable mais demeure fragile, en raison notamment des autres espèces, car c'est un tout petit oiseau de moins de cinquante grammes à l'âge adulte. Un poussin par an et par couple, il peut vivre une quinzaine d'années, en milieu rocheux, éboulis et falaise. Il a déjà été observé à plus de 120 km à l'intérieur du continent antarctique et se nourrit exclusivement de produits marins (plancton, crustacés et petits calamars). Il parcourt plus de 40.000 km par an, se trouve en été austral en Antarctique (mi-octobre/fin avril) et en été boréal.....en Arctique (mai/septembre). Pôle sud - pôle nord, c'est le recordman de la longue distance ! Petit mais.....costaud !

Camille MERMILLON/Institut Polaire Français

Vous l'aurez donc compris, à l'exception du manchot empereur qui vit sur la banquise et se trouve donc à DDU en hiver, les autres oiseaux sont présents en terre Adélie seulement en été (novembre/mars).

A l'exception notable des phoques, la faune aviaire est actuellement la seule faisant l'objet de programmes de recherches et d'études scientifiques à Dumont d'Urville. La biologie marine, disciple pratiquée à DDU jusqu'au début des années 2010, notamment sous l'égide de programmes pilotés par le Muséum national d’Histoire naturelle, souffre aujourd'hui d'un déficit de financements et de priorités pour pouvoir être réalisée dans de bonnes conditions. Mais ceci est un autre débat qui concerne les ambitions de la recherche française et les moyens que le pays entend y consacrer....

(article réalisé avec le précieux concours de Jimmy l'ornithologue)
 

2 commentaires:

  1. Merci Dista et Jimmy pour cette présentation, les photos sont bien jolies !

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  2. Merci Jean Phi pour cet article que j'attendais avec impatience depuis.....deux mois ! Pour la passionnée de la vie animale que je suis, c'est enrichissant. Suffisamment précis pour englober la diversité que vous rencontrez en terre Adélie et sans trop de multiples détails pour ne pas noyer le néophyte. Je reconnais bien là ton esprit de synthèse.
    A quand un article similaire sur la faune sous marine ? Pas dans deux mois j'espère.....:)
    Bonne continuation à ton équipe. Reviens nous vite.

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